La comptabilité en micro-entreprise : entre simplicité affichée et rigueur nécessaire
Quand on choisit la micro-entreprise (anciennement auto-entreprise), c’est souvent pour éviter la paperasse, simplifier au maximum… et ne pas avoir à “faire de la compta”.
Et il faut bien l’admettre : c’est plutôt vrai.
La comptabilité d’une micro-entreprise est très allégée par rapport aux sociétés classiques. Pas de bilan, pas de compte de résultat, pas d’amortissements compliqués.
Mais attention : allégée ne veut pas dire bâclée. Et facile ne veut pas dire sans conséquences.
Alors à quoi ressemble vraiment la comptabilité d’une micro-entreprise ? Quelles sont vos obligations réelles ? Et surtout, qu’est-ce qui est utile, au-delà du minimum légal, pour suivre sérieusement votre activité ?
Ce que vous êtes obligé de faire
Le cadre est clair. En micro-entreprise, votre comptabilité repose sur deux piliers principaux :
1. Un livre de recettes
Un registre chronologique de toutes les rentrées d’argent encaissées. On y note pour chaque paiement :
- la date,
- le montant,
- la nature de la vente ou prestation,
- le mode de règlement (espèces, virement, chèque, etc.),
- et l’identité du client si c’est une vente B2B.
🟢 Ce livre est obligatoire pour tous, que vous vendiez des biens ou des services.
2. Un registre des achats (si applicable)
Seulement si vous vendez des marchandises ou matières premières.
Dans ce registre, vous consignez toutes les dépenses liées aux achats revendus, avec :
- la date de l’achat,
- le fournisseur,
- la description,
- le montant payé.
📎 Ce que vous n’avez pas à faire
Pas de bilan, pas de compte de résultat, pas de déclaration de TVA (sauf si vous la dépassez), pas de suivi des créances ou dettes, pas d’amortissements d’immobilisation.
Mais… ça veut aussi dire que vous ne pouvez pas déduire vos charges réelles, ni amortir votre ordinateur flambant neuf, ni récupérer la TVA sur vos achats (tant que vous êtes sous franchise).
En résumé, vous déclarez un chiffre d’affaires brut, et l’administration applique un abattement forfaitaire pour calculer votre revenu imposable :
- 71 % pour la vente de biens,
- 50 % pour les prestations artisanales ou commerciales,
- 34 % pour les activités libérales.
Ce que vous devriez faire
Maintenant, mettons les obligations de côté. Car ce qui est légalement suffisant n’est pas toujours suffisant pour bien gérer.
Une micro-entreprise, c’est une vraie entreprise. Et comme toute activité professionnelle, elle mérite un minimum de pilotage.
Voici ce qu’un micro-entrepreneur sérieux met en place :
✅ Suivi des dépenses
Même si vous ne pouvez pas les déduire, connaître vos coûts réels est essentiel pour fixer vos tarifs, anticiper vos marges, ou simplement savoir ce qu’il vous reste à la fin du mois.
✅ Calcul de votre résultat réel
Le chiffre d’affaires, c’est beau. Mais ce n’est pas ce que vous gagnez.
Le résultat réel (chiffre d’affaires – charges) est un indicateur que vous devriez calculer chaque mois.
✅ Simulation de fiscalité et cotisations
Avec les seuils, les taux variables, et les options comme le versement libératoire, comprendre combien vous allez vraiment payer à l’URSSAF et aux impôts évite les mauvaises surprises.
✅ Tableau de bord simplifié
Un petit fichier Excel (ou Google Sheets) peut faire des miracles :
- Total des recettes,
- Total des dépenses,
- Résultat mensuel,
- Évolution de la trésorerie,
- Estimation des cotisations à provisionner.
🔍 Une comptabilité au service de votre activité
En micro-entreprise, la comptabilité n’est pas une fin en soi. C’est un tableau de bord, un indicateur de santé, un appui à la décision.
Elle vous aide à savoir :
- Si vous vivez vraiment de votre activité,
- Si vos tarifs sont viables,
- Si vous pouvez investir, changer de statut, ou prendre quelques jours de congé sans plomber votre trésorerie.
🧩 Et si vous passez un cap ?
Au-delà de certains seuils (77 700 € pour les prestations, 188 700 € pour la vente en 2024), vous changez de statut. Et là, la comptabilité réelle s’impose.
Donc autant s’y préparer petit à petit : suivi des amortissements, analyse de rentabilité, organisation rigoureuse…

📊 Comment utiliser efficacement ce tableau de bord micro-entreprise
Ce tableau ne se contente pas de stocker vos chiffres : il vous permet de piloter votre activité mois par mois, de façon claire, visuelle et automatisée. Voici comment en tirer le meilleur.
1. Saisissez vos recettes et vos dépenses chaque mois
Dans les colonnes « Recettes (€) » et « Dépenses (€) », indiquez :
- Ce que vous avez encaissé (factures payées, ventes…),
- Et ce que vous avez réellement payé (matériel, frais, abonnements…).
Le reste se calcule automatiquement :
- Résultat Net = Recettes – Dépenses
- Cotisations estimées = 22 % des recettes (taux micro-social par défaut)
- Trésorerie cumulative : elle évolue mois après mois selon votre performance
2. Analysez votre performance dans le temps
Grâce à la ligne « Trésorerie cumulative », vous voyez immédiatement :
- Si votre activité est en croissance ou en perte de vitesse,
- Quels mois ont été les plus rentables,
- Et si votre marge de manœuvre augmente ou fond comme neige au soleil.
3. Préparez vos déclarations et provisions
Même si les cotisations sont prélevées trimestriellement ou mensuellement, ce tableau vous permet de :
- Anticiper combien vous allez payer à l’URSSAF,
- Ne pas être pris au dépourvu,
- Ajuster vos tarifs si vous constatez que votre résultat net est trop faible.
4. Personnalisez selon votre activité
Vous pouvez adapter le taux de cotisation (22 %) si vous êtes :
- En activité libérale (taux souvent plus bas),
- En ACCRE (taux réduit temporairement),
- Ou si vous bénéficiez du versement libératoire de l’impôt sur le revenu.
5. En résumé
Ce tableau est votre tableau de bord personnel :
- Pour voir où vous allez,
- Pour décider sereinement,
- Et pour faire évoluer votre activité sur des bases solides.

📘 Bilan comptable d’une micro-entreprise – Version simplifiée
1. Pourquoi faire un bilan en micro-entreprise ?
Même si la loi ne vous oblige pas à produire un bilan comptable en tant que micro-entrepreneur, il reste très utile :
- Pour visualiser votre patrimoine professionnel à un instant donné,
- Pour préparer une évolution de statut (vers EI, EURL…),
- Pour suivre la rentabilité et l’équilibre financier de votre activité,
- Pour rassurer un banquier en cas de demande de financement.
2. Structure du bilan simplifié
ACTIF (ce que vous possédez) | MONTANT (€) | PASSIF (ce que vous devez / capital) | MONTANT (€) |
---|---|---|---|
Matériel pro (ordinateur, outil…) | 1 500 | Apport personnel | 2 000 |
Solde bancaire | 2 300 | Résultat de l’exercice | 1 300 |
Factures clients non encaissées | 500 | Charges sociales à payer | 1 000 |
Autres dettes éventuelles | 0 | ||
TOTAL ACTIF | 4 300 | TOTAL PASSIF | 4 300 |
👉 L’équilibre Actif = Passif est fondamental. C’est le principe de base d’un bilan comptable.
3. Les postes à renseigner
✅ Actif :
- Immobilisations : biens professionnels durables (ordinateur, véhicule…)
- Trésorerie : votre solde bancaire pro + caisse
- Créances clients : factures envoyées mais non encore encaissées
✅ Passif :
- Apports personnels : ce que vous avez investi vous-même
- Résultat net : vos gains (recettes – dépenses)
- Dettes éventuelles : fournisseurs, cotisations URSSAF à régler, TVA à reverser (si concerné)
4. À quoi sert ce bilan dans la pratique ?
- 🧭 Connaître la valeur de votre activité à un moment donné
- 📈 Comparer votre évolution d’une année sur l’autre
- 💰 Décider d’un investissement, d’un changement de statut ou d’un prêt
- 📂 Présenter votre activité sérieusement à un organisme externe (banque, investisseur, partenaire)
5. Créez votre propre bilan (modèle prêt à l’emploi)
Avec un simple tableur Excel, vous pouvez créer ce type de bilan :
- Listez vos biens, comptes, créances, dettes et apports
- Utilisez des formules pour totaliser actif et passif
- Vérifiez que les deux colonnes sont bien équilibrées
📥

Les grandes étapes de la comptabilité en micro-entreprise
Même si la comptabilité des micro-entrepreneurs est simplifiée, elle suit une logique précise. Voici les étapes à respecter pour rester conforme, organisé… et serein.
1. Tenue d’un livre des recettes
📘 Obligatoire pour tous les micro-entrepreneurs.
- Doit être tenu au jour le jour.
- Contient : date, nature, montant, mode de règlement et identité du client.
- Peut être tenu sur Excel, papier ou logiciel.
Objectif : tracer toutes les encaissements réels, pas seulement les factures.
2. Tenue d’un registre des achats (si activité commerciale ou artisanale)
📘 Obligatoire pour les activités de vente de biens ou de matières premières.
- Regroupe tous les achats liés à l’activité revendue.
- Mentionne : fournisseur, nature, montant, date.
Objectif : documenter la traçabilité des approvisionnements.
3. Classement et conservation des justificatifs
🗂️ Chaque pièce comptable doit être archivée pendant 10 ans :
- Factures clients,
- Notes de frais,
- Reçus, tickets de caisse,
- Relevés bancaires.
Conseil : faites un tri mensuel pour éviter l’accumulation.
4. Calcul du chiffre d’affaires
📆 À la fin de chaque mois ou trimestre :
- Additionnez toutes les recettes encaissées,
- Vérifiez que vous ne dépassez pas les plafonds (77 700 € ou 188 700 € selon l’activité),
- Si dépassement sur 2 années consécutives → changement de régime.
- Objectif : préparer les déclarations URSSAF et votre éventuelle évolution de statut.
5. Déclaration de chiffre d’affaires
📤 À effectuer mensuellement ou trimestriellement sur autoentrepreneur.urssaf.fr.
- Déclarez le montant exact encaissé (pas besoin de déduire les charges).
- L’URSSAF calcule automatiquement les cotisations sociales dues.
- Si vous avez choisi le versement libératoire, l’impôt sur le revenu est prélevé en même temps.
6. Suivi de votre trésorerie et résultat réel (optionnel mais conseillé)
Même si vous ne tenez pas une comptabilité complète :
- Suivez vos dépenses,
- Calculez votre résultat net réel : recettes – charges,
- Tenez un tableau de bord mensuel (Excel ou outil en ligne).
Objectif : piloter votre activité, anticiper vos obligations et éviter les surprises.
7. Préparation d’un bilan simplifié (optionnel)
À la fin de l’année :
- Faites le point sur ce que vous possédez (matériel, trésorerie, créances),
- Ce que vous devez (charges, URSSAF, TVA si assujetti),
- Et ce que vous avez gagné réellement.
Utile pour : changer de statut, obtenir un crédit, ou simplement comprendre la santé réelle de votre activité.
🧮 Récap
Étape | Obligatoire ? | Fréquence |
---|---|---|
Livre des recettes | ✅ Oui | Quotidien |
Registre des achats | ✅ Oui (si vente) | Quotidien |
Tri des justificatifs | ✅ Oui | Permanent |
Calcul du chiffre d’affaires | ✅ Oui | Mensuel ou trimestriel |
Déclaration URSSAF | ✅ Oui | Mensuelle / Trimestrielle |
Suivi des charges & trésorerie | ❌ Optionnel | Mensuel |
Bilan simplifié | ❌ Optionnel | Annuel |