Déclaration de Performance Extra-Financière (DPEF)
La Déclaration de Performance Extra-Financière (DPEF) est un outil stratégique qui permet aux entreprises de rendre compte de leurs impacts sociaux, environnementaux et sociétaux, en complément des états financiers traditionnels. Introduite par la directive européenne 2014/95/UE (NFRD), transposée en droit français, la DPEF marque une évolution du reporting d’entreprise vers une approche intégrée de la performance.
Ce guide propose une vue d’ensemble des exigences de la DPEF, ses liens avec la comptabilité, et des conseils pratiques pour la structuration de ce document essentiel.
1. Qu’est-ce que la DPEF ?
La DPEF est une obligation légale pour certaines entreprises, qui doivent publier chaque année une déclaration détaillant leurs politiques, actions et résultats en matière :
- Environnementale
- Sociale et sociétale
- Lutte contre la corruption
- Respect des droits humains
- Gouvernance et éthique
Elle vise à fournir aux parties prenantes (investisseurs, clients, salariés, autorités) une lecture complète de la performance globale de l’entreprise, au-delà des résultats financiers.
2. Qui est concerné ?
Depuis la loi Sapin II et la transposition de la NFRD, les entreprises concernées par la DPEF sont celles qui remplissent deux des trois critères suivants :
Critère | Seuil |
---|---|
Nombre de salariés | ≥ 500 |
Chiffre d’affaires (CA) | ≥ 100 millions d’euros |
Total bilan | ≥ 100 millions d’euros |
Remarque : Avec l’entrée en vigueur progressive de la directive CSRD à partir de 2024, le périmètre s’élargit à plus d’entreprises, y compris certaines PME cotées.
3. 🧱 Contenu obligatoire d’une DPEF
La DPEF doit comporter les éléments suivants :
a. Modèle d’affaires
- Description du fonctionnement de l’entreprise, de sa chaîne de valeur et des enjeux ESG liés à son activité
b. Politiques RSE mises en œuvre
- Démarches environnementales (climat, déchets, énergie…)
- Actions sociales (sécurité, formation, égalité…)
- Engagements éthiques (anti-corruption, achats responsables…)
c. Résultats et indicateurs de performance
- KPI ESG mesurables (émissions CO₂, taux d’absentéisme, accidents du travail, formation, etc.)
d. Risques extra-financiers
- Identification des principaux risques ESG
- Mesures de prévention et dispositifs de gestion associés
4. DPEF et comptabilité : comment les articuler ?
Bien qu’elle ne relève pas de la comptabilité au sens classique, la DPEF s’appuie de plus en plus sur des données quantitatives vérifiables. Elle devient donc complémentaire de la comptabilité générale et analytique.
a. Liens avec les états financiers :
- CapEx/OpEx verts : obligations de reporting sur la part verte des investissements, en lien avec la taxonomie européenne
- Provisionnement des risques ESG : intégration possible dans les passifs (ex : litiges environnementaux)
- Suivi budgétaire des actions RSE : coûts des actions de réduction d’empreinte carbone, dépenses en formation, politiques de diversité…
b. Construction d’indicateurs :
- Utilisation de données comptables et RH pour le calcul de KPI (formation, masse salariale, effectif, investissements durables…)
- Développement de tableaux de bord ESG intégrés à la comptabilité analytique
c. Exigence de fiabilité :
- Certaines données doivent être auditées par un Organisme Tiers Indépendant (OTI)
- La DPEF devient ainsi un outil de pilotage fiable et aligné avec les données financières
5. ✅ Bonnes pratiques de mise en œuvre
Voici quelques recommandations pour bien structurer une DPEF :
Étape | Bonnes pratiques |
---|---|
Définition du périmètre | Inclure toutes les entités et sites pertinents |
Gouvernance du reporting | Nommer un référent RSE + impliquer la direction financière |
Collecte des données | Centraliser les données via des outils partagés ou ERP |
Choix des indicateurs | S’appuyer sur des référentiels reconnus (GRI, ESRS, etc.) |
Intégration comptable | Lier les KPIs ESG aux données budgétaires et comptables |
Audit et vérification | Préparer la revue de l’OTI dès la phase de rédaction |
6. Vers la CSRD : un changement de paradigme
La Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), en cours de déploiement, transformera profondément la DPEF à partir de 2024 :
- Nouvelles normes européennes (ESRS) obligatoires
- Extension du champ d’application
- Numérisation du reporting (format XBRL)
- Audit obligatoire des données ESG
Cela implique une intégration plus poussée de la comptabilité, de l’ERP et des outils RSE pour produire un reporting fiable, traçable et auditable.
La DPEF est bien plus qu’une simple formalité réglementaire. Elle devient un outil stratégique, mêlant données financières et extra-financières, pour orienter l’entreprise vers une croissance durable.
Sa réussite repose sur une collaboration étroite entre les équipes RSE, finance et contrôle de gestion, et sur une convergence des systèmes d’information.
Nous vous présentons ci-après un extrait simplifié de la comptabilité d’une entreprise, comprenant des éléments du bilan, du compte de résultat, et un tableau de flux de trésorerie. Ces extraits sont généralement inclus en annexe ou en complément du rapport extra-financier, notamment pour appuyer les indicateurs ESG avec des données financières fiables.
🧾 1. Extrait du Bilan Comptable (au 31/12/2024)
ACTIF | Montant (€) | PASSIF | Montant (€) |
---|---|---|---|
Actif non courant | Capitaux propres | ||
Immobilisations incorporelles | 480 000 | Capital social | 500 000 |
Immobilisations corporelles | 1 250 000 | Réserves | 200 000 |
Immobilisations financières | 90 000 | Résultat net de l’exercice | 525 000 |
1 820 000 | 1 225 000 | ||
Actif courant | Dettes | ||
Stocks | 350 000 | Dettes financières | 650 000 |
Créances clients | 780 000 | Dettes fournisseurs | 210 000 |
Trésorerie active | 720 000 | Dettes fiscales et sociales | 235 000 |
1 850 000 | 1 095 000 | ||
TOTAL ACTIF | 3 670 000 | TOTAL PASSIF | 3 670 000 |
2. Extrait du Compte de Résultat (exercice clos au 31/12/2024)
Postes | Montant (€) |
---|---|
Chiffre d’affaires | 4 950 000 |
Autres produits d’exploitation | 120 000 |
Achats consommés | (1 950 000) |
Charges de personnel | (1 600 000) |
Dotations aux amortissements | (350 000) |
Autres charges d’exploitation | (300 000) |
Résultat d’exploitation | 870 000 |
Résultat financier | (45 000) |
Résultat exceptionnel | 20 000 |
Impôt sur les bénéfices | (320 000) |
Résultat net | 525 000 |
3. Tableau simplifié des Flux de Trésorerie (Cash-Flow)
Catégorie de flux | Montant (€) |
---|---|
Flux de trésorerie d’exploitation | +875 000 |
Encaissements clients | +4 800 000 |
Paiements fournisseurs et salaires | (3 925 000) |
Impôts versés | (200 000) |
Flux d’investissement | (580 000) |
Achat d’immobilisations | (600 000) |
Produits de cession | +20 000 |
Flux de financement | +250 000 |
Emprunts reçus | +400 000 |
Remboursements | (150 000) |
Variation de trésorerie nette | +545 000 |
Utilisation dans un rapport extra-financier :
Ces états financiers permettent de :
- Appuyer les indicateurs ESG liés à l’environnement (ex. : % CapEx vert)
- Évaluer la part des investissements durables
- Relier les performances sociales (ex. masse salariale, formation) à des données financières réelles
- Montrer la soutenabilité économique de la stratégie RSE
Étude de cas – Automatisation du Reporting Extra-Financier chez EcoNova
Contexte de l’entreprise
EcoNova est une entreprise française de 450 collaborateurs spécialisée dans la production d’emballages biodégradables. Forte de son engagement environnemental, l’entreprise a progressivement intégré des critères ESG (Environnement, Social, Gouvernance) dans sa stratégie.
Depuis 2022, EcoNova est soumise à l’obligation de publier un rapport extra-financier annuel conformément à la réglementation européenne (CSRD). L’entreprise souhaitait passer d’un reporting manuel fragmenté à un système automatisé et consolidé, fiable et accessible à tous les services.
Objectifs du projet
- Centraliser toutes les données extra-financières dans un outil unique
- Automatiser la collecte et l’analyse des indicateurs ESG
- Améliorer la qualité et la fréquence des reportings
- Assurer la conformité réglementaire (CSRD, Taxonomie UE, ODD)
- Valoriser les engagements RSE auprès des parties prenantes
⚙️ Solution mise en place
1. Mise en œuvre d’un modèle Excel intelligent
Un modèle Excel personnalisé a été conçu avec plusieurs feuilles dédiées aux axes ESG :
- Environnement : émissions CO2, consommation énergétique, recyclage
- Social : diversité, absentéisme, formation, sécurité
- Gouvernance : parité, politiques éthiques, conformité
🔄 Formules automatisées et graphes dynamiques ont été intégrés pour générer une synthèse mensuelle et annuelle.
2. 🔗 Intégration de Power Query et Power Automate
Les données ont été connectées aux sources RH, ERP et comptables de l’entreprise via Power Query.
Un flux Power Automate a été paramétré pour :
- Mettre à jour les données en temps réel
- Générer des fichiers Word de reporting
- Envoyer un tableau de bord mensuel aux managers
3. Formation & adoption
Des ateliers ont été menés auprès des départements RH, QHSE et finance pour :
- Former les utilisateurs à la saisie automatisée
- Définir les indicateurs clés de performance (KPI)
- Créer un calendrier de reporting trimestriel
Résultats obtenus
Indicateur | Avant | Après | Évolution |
---|---|---|---|
Temps de production du rapport | 3 semaines | 3 jours | ⏱️ -85% |
Fiabilité des données | Moyenne | Élevée | ✅ +40% |
Nombre d’indicateurs suivis | 12 | 36 | 📊 x3 |
Accès au reporting | Direction uniquement | Tous les services | 🌐 Étendu |
Fréquence du suivi | Annuelle | Trimestrielle | 🔁 Améliorée |
Facteurs clés de succès
- Implication des parties prenantes dès la conception
- Choix d’outils adaptés et interconnectés
- Visualisation claire des données (graphes, couleurs, alertes)
- Adoption rapide grâce à une ergonomie simple et familière
Perspectives
EcoNova prévoit d’aller plus loin en 2025 avec :
- L’intégration d’une plateforme ESG cloud
- Un suivi automatisé des Objectifs de Développement Durable (ODD)
- La publication d’un rapport RSE interactif à destination des investisseurs
Conclusion
Grâce à l’automatisation de son reporting extra-financier, EcoNova a transformé une contrainte réglementaire en levier stratégique. L’entreprise peut désormais piloter sa performance durable de façon précise, régulière et transparente, tout en valorisant ses engagements auprès de ses collaborateurs, clients et partenaires financiers.