Cp / Cpk : comprendre, calculer et décider — guide pratique (avec modèle “one-page”)
Recommandés
Les indices de capabilité Cp et Cpk quantifient à quel point un procédé tient ses limites de spécification (LSL/USL). Dans la pratique, ils transforment un nuage de mesures en un diagnostic chiffré et actionnable : le procédé est-il capable, centré, robuste ? Voici l’essentiel pour les calculer, les lire sans piège, et les relier à votre modèle Excel “one-page”.
1) Ce que mesurent Cp et Cpk
- Cp mesure le potentiel de capabilité si le procédé est parfaitement centré sur la cible :

- Cpk mesure la capabilité réelle, en tenant compte du décalage de la moyenne par rapport au centre de la tolérance :

Où μ\mu est la moyenne et σ\sigma l’écart-type (variabilité court terme dans l’approche classique Cp/Cpk).
À retenir :
- Cp répond “le procédé est-il assez serré ?” (largeur des specs vs dispersion).
- Cpk répond “le procédé est-il serré et centré ?” (dispersion et centrage).
2) Données et prérequis
- Échantillons : viser ≥ 25, idéalement 50–100 mesures représentatives d’un procédé stable (pas de changements de réglages, de matière, d’équipe).
- Stabilité : valider l’absence de dérive via graphique I-MR ou X̄-R si possible.
- Normalité : Cp/Cpk supposent une distribution ≈ normale. En cas de non-normalité, envisager une transformation (Box-Cox/Johnson) ou des capabilités percentiles.
- Mesure : fiabiliser le système de mesure (MSA / Gage R&R).
- Spécifications : vérifier LSL < USL et la cible (utile pour le centrage).
3) Mode d’emploi du modèle Excel “one-page”
- Collez vos mesures en B13:B500.
- Renseignez LSL, USL et Cible.
- L’onglet calcule automatiquement : n, moyenne, σ = STDEV.S, Z inférieur/supérieur, % dans specs, Cp, CPU, CPL, Cpk et un statut coloré.
- L’encart “OK / ⚠” vous alerte si LSL ≥ USL.
- La sparkline donne une tendance visuelle rapide.
Astuce : si vous importez des données depuis un autre logiciel, collez en valeurs (sans format) pour éviter que des nombres restent en texte.
4) Exemple chiffré (lecture pas à pas)
Disons LSL = 9,90 ; USL = 10,10 ; µ = 10,02 ; σ = 0,030.

Interprétation : la dispersion pourrait passer (Cp>1), mais la moyenne est décalée vers l’USL → Cpk < 1 : non capable en l’état. La priorité n’est pas de réduire σ mais de recentrer le procédé (réglage, consigne, biais).
5) Seuils usuels et décisions
- Cpk ≥ 1,33 : capable (standard industriel courant).
- Cpk ≥ 1,67 : exigence sévère (sécurité/critique).
- Cpk ≈ 2,00 : gamme “Six Sigma” pour un procédé centré.
- Cpk < 1,00 : non capable → agir (recentrage, réduction de variabilité, revoir les specs ou le procédé).
Lisez aussi Cp :
- Cp < Cpk (rare) : signe d’anomalie (vérifier les calculs).
- Cp ≫ Cpk : procédé assez serré mais mal centré.
- Cp ≈ Cpk : procédé bien centré ; la marge dépend surtout de σ.
6) Erreurs fréquentes… et parades
- Procédé instable (dérive, lots mélangés) → Cpk “moyenné” trompeur.
Parade : segmenter par lot/poste/matière ; vérifier des cartes de contrôle. - Non-normalité marquée (asymétrie, bicarte) → extrapolations erronées.
Parade : transformation (Box-Cox) ou indices basés sur percentiles. - Système de mesure incertain (Gage R&R > 10–20 %) → σ gonflé.
Parade : fiabiliser la mesure avant d’évaluer la capabilité. - Se concentrer sur Cp seul → oublier le centrage.
Parade : toujours rapporter Cp & Cpk (et CPU/CPL). - Données trop peu nombreuses (n≈10) → indices volatils.
Parade : viser n≥25 (mieux 50–100). - LSL/USL incorrects (copiés à l’envers, mauvaise unité).
Parade : vérification croisée et conversion d’unités.
7) Et les indices Pp / Ppk (long terme) ?
Pp/Ppk évaluent la capabilité long terme (toutes sources de variabilité confondues). Les formules sont analogues en remplaçant σ\sigma “court terme” par la dispersion totale

Lecture combinée :
- Cpk ≫ Ppk : procédé bien réglé en court terme, mais dérives/variations entre lots, équipes, saisons…
- Cpk ≈ Ppk : comportement cohérent court/long terme.
8) Mini-checklist avant diffusion d’un Cp/Cpk
- Procédé stable pendant l’échantillonnage
- n ≥ 25 (idéal 50–100)
- MSA/Gage R&R satisfaisant
- Normalité raisonnable (ou approche alternative)
- Cp, CPU, CPL, Cpk tous reportés + commentaire
- Décision jointe (recentrage, réduction σ, revue specs, plan d’action)
Cp/Cpk ne sont pas qu’un “score” : ce sont des leviers de décision.
- Cp vous dit si la variabilité est compatible avec la tolérance.
- Cpk vous dit si, en pratique, le procédé respecte les specs compte tenu du centrage.
Avec des données fiables et un procédé stable, votre modèle “one-page” permet de calculer vite, lire clair, et agir : recentrer si Cpk est bridé par le biais, réduire la variabilité si Cp est faible, ou consolider quand les deux sont au vert.
Modèle Excel “One Page” Cp/Cpk — description
Vue d’ensemble
Un seul onglet CpCpk_OnePage prêt à imprimer (1 page). Vous collez vos mesures en colonne B, vous saisissez LSL/USL/Cible, et le classeur calcule automatiquement n, moyenne, σ, % dans specs, Cp, CPU/CPL, Cpk + un statut coloré.
Structure de la feuille
1) En-tête
- B1:N1 – Titre : “Modèle simplifié – Indices de capabilité Cp / Cpk (One Page)”.
2) Paramètres (entrées)
- Bloc B3:D8.
- C4 = LSL, C5 = USL, C6 = Cible, C7 = Unité, C8 = Décimales.
- D4 contrôle de cohérence :
=IF(C4>=C5,"⚠ LSL doit être < USL","OK")
(vert si OK, rouge sinon).
3) Statistiques (calculées)
- Bloc E3:H8.
- n (F4) :
=COUNT(B13:B500) - Moyenne (F5) :
=IFERROR(AVERAGE(B13:B500),"") - Écart-type σ (F6) :
=IFERROR(STDEV.S(B13:B500),"") - Z inf (F7) :
=IF(F6="","",IF(C4="","",(F5-C4)/F6)) - Z sup (F8) :
=IF(F6="","",IF(C5="","",(C5-F5)/F6)) - % dans specs (H4) :
=IF(F6="","",NORM.DIST(C5,F5,F6,TRUE)-NORM.DIST(C4,F5,F6,TRUE)) - Min/Max/Amplitude (H5/H6/H7) : min, max, max-min des mesures.
- n (F4) :
4) Indices de capabilité
- Bloc J3:L8.
- Cp (K4) :
=(C5-C4)/(6*F6) - CPU (K5) :
=(C5-F5)/(3*F6) - CPL (K6) :
=(F5-C4)/(3*F6) - Cpk (K7) :
=MIN(K5,K6) - Statut (K8:L8) : texte+couleur auto
- ≥ 1,33 : Capable (vert)
- ≥ 1,00 : Marge faible (ambre)
- < 1,00 : Non capable (rouge)
- Cp (K4) :
5) Zone de données
- B11:N11 – Bandeau “Mesures…”.
- B12 – En-tête “Mesure”.
- B13:B500 – Collez vos valeurs (50 exemples déjà saisis).
- M4 – Sparkline tendance sur
B13:B62; L4 libellé “Tendance”.
6) Notes & mise en page
- B64:N66 – Conseils d’usage (où coller, comment lire).
- Impression : zone B1:N66, paysage, fit to 1 page (marges serrées, centrage horizontal).
Utilisation rapide
- Remplir C4–C6 (LSL/USL/Cible) et coller les mesures en B13:B500.
- Lire F5/F6 (moyenne, σ) puis K4–K7 (Cp, CPU/CPL, Cpk).
- Se baser sur le statut (K8:L8) pour décider : recentrer (si biais), réduire σ, ou valider.


Cas : temps de démarrage (TTI) d’une app mobile
Équipe mobile : on veut garantir un Time To Interactive (TTI) < 2,20 s sur 95 % des appareils. On suit le TTI sur chaque build via télémétrie.
- Spécification : USL = 2,20 s (seuil max).
- Côté unique : pas de vraie limite inférieure → on met LSL = 0 s dans le fichier (cas “one-sided”).
- Échantillon : 60 démarrages mesurés (collés en B13:B500).
Mesures (exemple)
Moyenne μ=1,60 s ; écart-type σ=0,15
Calculs (dans le modèle)
Que décider ?
- OK pour release : Cpk ≈ 1,33 → on tient la marge.
- Mettre un garde-fou CI/CD : “bloquer la release si
Cpk < 1,33ou si la moyenne > 1,80 s”. - En suivi : tracer CPU (côté critique) build-par-build.
Si Cpk chute (< 1,00)
Plan d’action prioritaire côté centrage et/ou dispersion :
- Recentrer : lazy-load des modules lourds, différer analytics/init SDK, optimiser cold start.
- Réduire σ : paralléliser I/O, stabiliser la chaîne (assets, réseau, device gates), réduire variance entre devices.
- Segmenter : Cpk par plateforme / device-tier (bas de gamme vs haut de gamme).
Paramétrage dans votre Excel
- C4 (LSL) =
0; C5 (USL) =2,20; C7 (Unité) =s. - Collez les TTI en B13:B500 → le modèle calcule CPU/CPL/Cpk et colore le statut.
- Pour une spec purement unilatérale, basez la décision surtout sur CPU (et donc Cpk = CPU ici).







