Santé & Sécurité au Travail (SST) : Terminologies, définitions et guide complet + feuille Word
La Santé et Sécurité au Travail (SST) est un système vivant qui protège les personnes, préserve la disponibilité des moyens de production et installe une culture de fiabilité. Pour passer du discours à la pratique, on démystifie un lexique clair des termes clés, puis un guide opératoire qui va du repérage des dangers jusqu’au pilotage des indicateurs et à l’amélioration continue. Le tout pensé pour être applicable dans l’industrie, le BTP, la logistique, l’agroalimentaire, l’énergie/maintenance et les services.
1) Lexique SST — 25 notions à connaître
- Danger : propriété intrinsèque susceptible de causer un dommage (ex. énergie électrique, produit corrosif, chute de hauteur).
- Risque : combinaison probabilité × gravité qu’un dommage survienne dans une situation donnée.
- Situation dangereuse : contexte où une personne est exposée au danger (ex. carter ouvert en rotation).
- Événement indésirable : incident ou accident (perte de contrôle d’un danger).
- Incident : événement sans dommage corporel, mais révélateur d’un risque (ex. éclaboussure de soude sur EPI).
- Presqu’accident / Near-miss : incident à un cheveu de l’accident; c’est un signal faible précieux.
- Accident du travail (AT) : événement soudain à l’occasion du travail, avec lésion corporelle.
- Maladie professionnelle (MP) : atteinte à la santé résultant d’une exposition prolongée (ex. solvants, bruit).
- Péril grave et imminent : situation exigeant une action immédiate (arrêt/évacuation).
- EPC (Protections collectives) : barrières physiques/techniques qui protègent tout le monde (garde-corps, capotages).
- EPI (Équipements de protection individuelle) : protection de la personne (lunettes, gants, harnais).
- Hiérarchie des mesures : Éliminer → Substituer → EPC → Organisation/Procédures → EPI (en dernier recours).
- LOTO (Lock-Out Tag-Out) : consignation/étiquetage pour empêcher toute remise sous tension/énergie.
- Permis de travail : autorisation formelle pour travaux à risque (feu, espaces confinés, HT, chimique).
- DUERP / Évaluation des risques : document/registre des dangers, cotations, actions et responsabilités.
- Plan d’urgence / d’évacuation : organisation, consignes, signalétique, exercices.
- AMDEC / FMEA : analyse Modes de Défaillance – Effets – Criticité (processus/machine/méthode).
- HAZOP : analyse systématique des écarts sur procédés (process safety).
- EHS / HSE / QHSE / SST : variantes d’acronymes (Environnement-Hygiène-Sécurité / Qualité-HSE).
- RPS : risques psychosociaux (charge, conflits, harcèlement, perte de sens).
- Ergonomie : adaptation du travail à l’humain (TMS, postures, cadence, manutentions).
- TF / TRIR / LTIFR : indicateurs d’accidentologie (taux de fréquence/recordables/accidents avec arrêt).
- Conformité réglementaire : obligations légales et normatives applicables au site/activité.
- Action corrective : supprime la cause d’un écart (au-delà du “patch” immédiat).
- Culture sécurité : ensemble de comportements, réflexes et décisions qui donnent priorité à la protection.
2) La colonne vertébrale : du repérage à la maîtrise
a) Cartographier le travail réel
- Observer tâches, flux, co-activités (opérateurs, sous-traitants, visiteurs).
- Lister les dangers par zone : énergie (élec/gravité/pneumatique/hydraulique), chimique/biologique, mécanique (chocs, cisaillement), thermique, bruit, rayonnements, circulation interne, manutentions, chutes.
- Qualifier les expositions : fréquence, durée, nombre de personnes, situations anormales (démarrage, maintenance, nettoyage, réglage).
b) Coter les risques
- Construire une matrice simple (1–5) en probabilité × gravité (et option “maîtrise existante”).
- Classer A (traitement immédiat), B (planifié court), C (amélioration continue).
c) Choisir les mesures… dans le bon ordre
- Éliminer (supprimer la tâche ou le produit dangereux).
- Substituer (procédé/produit moins dangereux).
- EPC (enfermer le danger, capter à la source).
- Organisation/Procédures (LOTO, permis, formation, planning).
- EPI (dernier filet).
d) Prouver la maîtrise
- Traçabilité : permis signés, checklists, registres de contrôle, FDS, étiquetages, rapports d’essais, photos “avant/après”.
- Essais : test d’arrêt d’urgence, alarme incendie, retour d’expérience (REX).
3) Les “no-go” absolus (stop immédiat)
Certaines situations imposent l’arrêt instantané jusqu’à correction :
- Consignation absente lors d’une intervention (LOTO non appliqué).
- Chute de hauteur sans protection (garde-corps, harnais, ancrage).
- Protections machine supprimées (carters démontés, capteurs shuntés).
- Issues de secours obstruées / extincteurs absents ou HS.
- Produits chimiques non étiquetés / FDS indisponibles.
- Électricité : coffret ouvert sous tension, bricolage, conducteurs nus.
Nommer ces cas “KO absolus” clarifie l’arbitrage : on sécurise d’abord, on discute ensuite.
4) Indicateurs : piloter sans complexité
a) Indicateurs de résultat (lagging)
- TF (taux de fréquence) — ex. :
TF = (AT avec arrêt × 1 000 000) / Heures travaillées. - TG (taux de gravité) — ex. :
TG = (Jours perdus × 1 000) / Heures travaillées. - TRIR/LTIFR (accidents enregistrables / accidents avec arrêt par 200 000 ou 1 000 000 h).
Attention : les dénominateurs varient selon les pays/secteurs. Fixez votre référentiel et tenez-vous-y.
Exemple (400 000 h/an, 2 AT avec arrêt, 15 jours perdus) :
TF = (2 × 1 000 000) / 400 000 = 5TG = (15 × 1 000) / 400 000 = 0,0375 ≈ 0,04
b) Indicateurs de conduite (leading)
- Near-miss signalés / 100 employés (plus c’est élevé, plus la culture de signalement vit).
- % brief sécurité quotidiens réalisés.
- % actions correctives closes dans le délai.
- % vérifications critiques à l’heure (LOTO, extincteurs, inspections chariots).
c) Score de ronde (simple et utile)
Score = (OK × 1 + À surveiller × 0,5) / (OK + À surveiller + KO) — N.A. exclus.
5) Procédures et documents vitaux
- Évaluation des risques (DUERP / registre) : risques cotés, actions, responsables, échéances, preuves.
- Consignation LOTO : énergie identifiée, points d’isolement, verrouillage, test “énergie zéro”, déconsignation.
- Permis de travail : feu, espace confiné, HT, toiture, chimique, levage.
- Plan d’urgence/évacuation : rôles, itinéraires, rassemblement, exercices (au moins annuels et tracés).
- Gestion produits chimiques : inventaire, FDS, stockage (compatibilités), étiquetage, déversements.
- Ergonomie/TMS : analyse de poste, aides à la manutention, alternance des gestes.
- Accueil sécurité : induction des nouveaux, intérimaires et sous-traitants (droits/consignes/EPI).
- Rex/Incidents : formulaire unique, analyse causes (5 Pourquoi, arbre, AMDEC), actions corrigées/confirmées.
6) Rôles et responsabilités — qui fait quoi ?
- Direction : exige le niveau de protection, finance les EPC, arbitre les conflits de priorité, voit les indicateurs.
- Management de proximité : anime les briefs, mène les rondes, déclenche les sécurisations à chaud.
- HSE : forme, maintient la bibliothèque d’items, veille réglementaire, audite la qualité des rondes, consolide les KPIs.
- Maintenance/Méthodes : conçoivent des solutions sûres (EPC, ergonomie), assurent les VGP et la métrologie.
- Achats/Logistique : intègrent la SST aux spécifications (machines, EPI, produits), maîtrisent la circulation interne.
- Opérateurs : signalent, proposent, stoppent en sécurité s’ils perçoivent un péril grave.
- Sous-traitants : respectent l’induction, les permis, les procédures site (co-activité maîtrisée).
Astuce : formalisez une RACI pour les grands risques (énergie, hauteur, chimique, incendie, trafic interne).
7) Former et entraîner — le cœur du dispositif
- Tronc commun : règles vitales (KO absolus), signalement near-miss, ergonomie de base, circulation, incendie/évacuation.
- Spécifiques : LOTO, permis de feu, chariots, espaces confinés, ATEX, produits chimiques.
- Micro-formations sur le poste (10–15 min), répétées, avec démonstration.
- Exercices : évacuation, déversement chimique, coupure d’énergie, AT survenant à un visiteur (chaîne d’alerte).
- Vérification d’efficacité : quiz courts, observation terrain, corrections à chaud.
8) Intégrer la SST aux décisions quotidiennes
- Projets/achats : principe d’inherence by design (élimination/substitution dès la conception).
- Planification : éviter les travaux à risque en co-activité (ou cloisonner et permiser).
- Changements : déclencher une MOC (management of change) à chaque modification de procédé, équipement, produit ou organisation.
- Maintenance : planifier le préventif aux fenêtres sûres, exiger LOTO, autoriser le redémarrage via check.
- RH : intégrer la SST dans l’entretien d’accueil, d’aptitude, de retour d’AT.
9) Mettre en place (ou rehausser) un système SST en 6 étapes
- Diagnostic flash (2–4 semaines) : visites terrain, revue documentation, entretiens, top 10 des risques/KO absolus.
- Plan des priorités : EPC rapides, procédures vitales (LOTO, permis), remise en conformité incendie/évac.
- Rondes quotidiennes sur zones critiques + near-miss simplifié (formulaire en 1 minute).
- Tableau de bord : 4–6 KPIs, score de ronde, KO absolus levés < 48 h, actions en délai.
- Formation ciblée : sessions très opérationnelles, évaluées et tracées.
- Boucle d’amélioration : revue mensuelle, REX, ajustement de la bibliothèque d’items, audits croisés.
10) Questions fréquentes
Les EPI suffisent-ils ?
Non. Les EPI sont le dernier rempart. Cherchez d’abord élimination, substitution et EPC.
Comment faire vivre les near-miss ?
Rendez la déclaration ultra-simple (QR code, 1 photo, 3 champs), remerciez chaque signalement et affichez les corrections obtenues grâce à eux.
Faut-il un outil logiciel ?
Pas forcément. Une checklist claire + un registre d’actions et des rondes régulières font déjà 80 % du résultat. Digitalisez ensuite pour l’échelle.
Quelles preuves garder ?
Permis signés, checklists, photos datées, FDS, rapports de contrôle, comptes-rendus d’exercices, enregistrements de formation et décisions de revue.
11) Mini-grille “à emporter” (tous secteurs)
- Énergie : LOTO appliqué ? Énergie zéro vérifiée ? (KO absolu sinon)
- Hauteur : garde-corps/harnais/ancrage ?
- Machines : carters/protections en place ? Arrêt d’urgence testé ?
- Chimique : étiquetage/FDS ? Stockage compatible ? Kit déversement ?
- Incendie/Évacuation : extincteurs à jour, accès libres, plans affichés ?
- Circulation : piétons vs engins, marquage, VGP chariots ?
- Ergonomie : gestes/postures, aides à la manutention, rotation ?
- Housekeeping : propreté/tri, pas d’empilements instables ?
- Brief sécurité : réalisé et tracé ?
- RPS : signaux (surcharge, conflits, isolement) repérés et traités ?
Santé & Sécurité au Travail (SST) -Tout savoir & guide express
Objectif. Protéger les personnes et fiabiliser l’activité, chaque jour, sans lourdeur.
Ce qu’il faut retenir
- Danger = source potentielle de dommage ; Risque = probabilité × gravité.
- Priorité des mesures : 1) Éliminer 2) Substituer 3) EPC (protections collectives) 4) Organisation/procédures 5) EPI (en dernier).
- Rondes SST (20–30 min) : observer → sécuriser à chaud → tracer l’action.
KO absolus (stop immédiat)
LOTO absent en intervention • Travail en hauteur sans protection • Carter/protection machine supprimé • Issues de secours obstruées / extincteurs HS • Produits chimiques sans étiquetage/FDS.
Ronde flash — 3 gestes
- Voir le travail réel (EPI, circulation, élec/énergie, chimique, incendie/évacuation, ergonomie).
- Agir tout de suite sur les écarts (balisage, arrêt, correction provisoire).
- Tracer : responsable, échéance, photo/preuve.
Indicateurs utiles
- Leading : near-miss/100 pers., % briefs quotidiens, % actions closes dans le délai.
- Lagging : TF, TG, TRIR/LTIFR.
- Ex. TF = (AT avec arrêt × 1 000 000) / Heures travaillées.
Documents vitaux
DUERP (évaluation des risques) • Procédure LOTO • Permis de travail (feu, espace confiné, HT, chimique) • Plan d’urgence/évacuation • FDS & registre chimique.
Rôles clés
Direction (cap & arbitrages) • Managers (rondes & actions) • HSE (méthode, veille, consolidation) • Maintenance/Méthodes (EPC, VGP) • Opérateurs (signalement, droit d’alerte).
Bon réflexe culture
Simplifier le signalement near-miss (1 photo, 3 champs) et remercier chaque remontée.
COMMENT mettre en place & animer la SST (ronde quotidienne)
But : voir le travail réel, sécuriser à chaud, tracer et traiter durablement.
1) Avant la ronde (5 min)
- Choisir la zone & l’itinéraire (carte simple, co-activités prévues).
- Sélectionner 10–20 points max (ossature “tous secteurs” + 2–3 points spécifiques).
- Préparer la fiche : menus OK / À surveiller / KO / N.A., champs Action, Responsable, Échéance.
- Rôles : 1 manager de proximité + 1 HSE (ou pair d’un autre service) + opérateur référent.
2) Pendant (15–25 min)
- Observer d’abord, commenter ensuite ; poser 2 questions ouvertes :
- “Qu’est-ce qui complique ou expose ici ?”
- “Que changeriez-vous dès aujourd’hui ?”
- Sécuriser à chaud (rubaliser, couper, isoler, EPI) si KO absolu.
- Prouver : photo/URL, n° étiquette extincteur/FDS, test LOTO, etc.
3) Après (5–10 min)
- Attribuer chaque action (1 propriétaire, 1 date).
- Compter : OK / À surveiller / KO / N.A. → Score de ronde
Score = (OK×1 + À surveiller×0,5) / (OK + À surveiller + KO)(N.A. exclus) - Remonter les KO absolus jusqu’à levée confirmée (preuve jointe).
- Affichage A4 : 3 irritants corrigés + 1 apprentissage du jour.
4) Rythme & pilotage
- Quotidien zones à risque / hebdomadaire ailleurs.
- Revue 10’/semaine : top 3 récurrences, actions en retard, KO absolus >48 h.
- KPIs sobres : % briefs faits, near-miss/100 pers., % actions closes délai, score moyen de ronde.
5) Règles vitales (no-go)
- LOTO absent en intervention • Travail en hauteur sans protection
- Carter/protection machine neutralisé • Issues de secours obstruées / extincteurs HS
- Produits chimiques sans étiquetage/FDS
→ STOP, sécuriser d’abord, analyser après.
6) Kit “prêt à l’emploi”
- Checklist couleurs (menus statut + photos)
- QR de signalement near-miss (1 photo, 3 champs)
- Plan d’évacuation + emplacements extincteurs
- Bibliothèque d’items par secteur (BTP, logistique, agro, énergie, santé/labo)
Astuce : une ronde courte tous les jours vaut mieux qu’une grande inspection mensuelle. La régularité crée la culture.
La SST performante est lisible et régulière : dangers clairement nommés, mesures hiérarchisées, rondes courtes, KO absolus non négociables, plan d’actions tenu, quelques indicateurs robustes et une capacité à apprendre des signaux faibles. Vous protégez vos équipes, vous sécurisez vos délais, vous réduisez vos coûts cachés — sans sur-bureaucratie.











